Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

mardi 7 décembre 2010

Affaire Edouard Stern (le déballage fait peur à Genève et Paris)

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Trente-huitième fortune française, Edouard Stern était l'intime des puissants et l'ami de Nicolas Sarkozy, de Dominique Strauss-Kahn, de Laurent Fabius, d'Hubert Védrine ou encore de l'ancien premier ministre britannique Tony Blair.

Des sources proches de l'enquête avaient en mars 2005 relaté la découverte de documents «sensibles». On ignore toujours leur contenu. Seule certitude, des documents relatifs à l'affaire Rhodia ont été saisis par les juges français d'Huy et Pons. Avant son décès, Edouard Stern avait engagé des procédures qui mettaient directement en cause Thierry Breton, ancien administrateur de Rhodia et ministre de l'Economie et des Finances de l'époque.

Au fil des mois, les avocats ont exhumé, les uns le passé de l'inculpée, les autres celui d'Edouard Stern. Les débats se crispent sur le volet le plus glauque de l'affaire. Cécile B. dit avoir «pété les plombs» lasse de devoir subir la perversité de son amant. Or, la partie civile a sous le coude des témoignages et des photos qui montrent que la jeune femme a pratiqué le sadomasochisme bien avant de connaître Edouard Stern comme en atteste un cliché où l'on voit l'un de ses anciens amants entravé sur un fauteuil gynécologique. Durant leur liaison, faite de ruptures et de réconciliations, Edouard Stern et son amie ont croisé beaucoup de monde à Genève et Paris.

Des amants, des maîtresses, des amis et des relations d'affaires qui n'ont certainement pas envie de voir leurs noms livrés sur la place publique. Les témoignages et documents recueillis durant l'enquête montrent que le couple évoluait dans un milieu à la fois libertin et élitiste. Un milieu parfois proche des cercles de pouvoir.

L'une de ses autres amantes, Julia Lemigova, sacrée Miss URSS en 1991, a demandé au procureur de la République française que soit réouverte l'enquête sur la mort de son enfant, qui serait né d'une liaison entre Stern et la reine de beauté russe.

Les deux maîtresses et l'enfant

Ce garçon prénommé Maximilien est décédé en 2000 dans des circonstances troubles. Selon le rapport de l'autopsie de l'époque, l'enfant, âgé de 5 mois, avait succombé à des lésions dues à des maltraitances. Il s'agit des effets du syndrome du "bébé secoué", quand un enfant en bas âge est secoué violemment. Si la nourrice d'origine bulgare - qui avait été recrutée par l'entourage de Stern - avait été la première suspecte et s'est ensuite enfuie après la mort du bébé, la mère de l'enfant réclame officiellement la réouverture d'une enquête sur les circonstances de la mort de son fils Maximilien. En effet, selon Le Parisien du 15 juin,, "avant de tuer Stern, Cécile Brossard s'était rapprochée de Julia, lui indiquant qu'elle savait des choses sur la mort de son fils". Julia Lemigova est même plus précise "Cécile Brossard voulait des détails sur notre propre liaison, j'ai voulu couper court, mais elle a tenté de me retenir "En échange, je vous dirais la vérité sur la mort de votre fils", précise-t-elle en ajoutant "Comme si Edouard Stern lui avait fait des confidences". Elle ajoute encore "Ces propos, (Cécile Brossard NDLR) elle les a réitérés face à moi, devant le juge suisse chargé de l'instruction sur le meutre d'Edouard".

Dans son interview au Parisien, Julia Lemigova affirme qu'elle fait un lien entre son ex-amant défunt et le décès de l'enfant : "Les sous-entendus de l'ancienne maîtresse sont considérés comme gravissimes" pour l'avocat de la famille Stern, comme l'indique La Tribune de Genève. Pour maître Bonnant, ces révélations sont une "recherche de publicité et d'argent", lit-on dans 24heures.ch.

L'avocat affirme que la paternité de Stern sur l'enfant n'a jamais été acquise et que la meurtrière de Stern a confié devant le juge avoir fait miroiter ces révélations pour soutirer des informations à son interlocutrice, indique 24heures.ch. Il déclare même, a contrario de Julia Lemigova : "A l'instruction, Cécile Brossard a dit qu'elle ne savait rien de cette affaire" ! Qui dit vrai ? Le Parisien rappelle la relation entre Stern et Lemigova : "Entre 1997 et 2000, cette ancienne miss URSS a entretenu une liaison passionnée avec le banquier. Enceinte de ce dernier, elle refuse d'avorter et met au monde Maximilien le 18 octobre 1999."

Sa tardive demande de vérité sur la mort de son fils s'expliquerait en raison de l'apparition de nouveaux éléments depuis le non-lieu - elle-même avait été mise en garde à vue dans cette triste affaire - sur la mort de Maximilien en 2002 : la présence d'ampoules de valium retrouvées dans la salle de bain de la nourrice - les expertises ont montré que ce produit a bien été administré à son fils quelques jours avant son décès, précise Le Parisien -, les tentatives de dissuasion d'Edouard Stern et ses proches quant à la poursuite de ses recherches. "J'étais anéantie. Ils me répétaient "tourne la page" (...), sa secrétaire m'a dit un jour "Laisse tomber, c'est une question de sécurité", j'avoue que j'ai eu peur"...

En dépit de nombreuses zones d'ombre, la justice a conclu à un non-lieu en 2002.

C’est à la suite de déclarations faites durant l’instruction, en 2006, par Cécile Brossard, la meurtrière du banquier, que l’histoire rebondit aujourd’hui. Et si son célèbre amant, retrouvé mort par balles en février 2005 dans une combinaison en latex à Genève, était derrière cette étrange affaire? Julia Lemigova vient de demander la réouverture de l’instruction devant le Tribunal de grande instance de Paris. Elle veut connaître toute la vérité. Mais elle se sait aussi désormais l’objet de menaces et de pressions. «On m’a dit: «Pour la sécurité de tes enfants, Julia, oublie…» raconte-t-elle. Mais, dix ans après la tragédie, sa tranquillité d’âme, juret-elle, ne peut être qu’au prix de cette ultime étape judiciaire. «Je vis dans la douleur et dans le doute.»

Dans sa chambre, les enquêteurs ont retrouvé une ampoule vide d’un médicament bulgare, du Diazepam. Par ailleurs, il ressort de l’autopsie et de l’examen toxicologique que du Valium a été administré à l’enfant dans les deux jours qui ont précédé son décès. «Tous ces indices, analyse Julia, laissent supposer plein de choses. J’espère que la police et Interpol vont retrouver cette nounou pour entreprendre enfin ce qui n’a pas été fait à l’époque. Pourquoi n’a-t-on même pas essayé d’aller en Bulgarie et de la retrouver? Dans le dossier, il y a son nom, son adresse! C’était trop facile, mais rien n’a été fait.»

Un accord secret

L’ombre de Julia Lemigova avait pesé sur tout le procès de Cécile Brossard, la meurtrière d’Edouard Stern, en juin 2009, mais son nom n’avait pas été cité une seule fois durant les débats au palais de justice de Genève. En coulisses, on évoquait un accord secret. En fait plutôt un deal assez clair: pas une allusion de la défense à Julia Lemigova, afin de ne pas nuire davantage encore à l’image de la victime, déjà bien écornée, contre le silence de la partie civile sur la liaison torride et pour le moins gênante d’un des avocats de Cécile Brossard avec sa cliente à la prison de Champ-Dollon… Cécile Brossard, Julia Lemigova l’a rencontrée à deux reprises. La première fois en octobre 2004, dans un bar parisien. Elle s’était fait passer pour une dénommée Laura, avocate au barreau de Versailles. En échange d’informations sur Edouard Stern, Cécile promettait à Julia de lui révéler la vérité sur la mort de son enfant. La seconde fois, ce fut dans le bureau du juge Michel-Alexandre Graber, à Genève, lors d’une confrontation. «Elle s’est expliquée encore une fois sur notre unique rencontre», explique Julia. Mais elle reste évasive sur le fond, tout en suggérant qu’Edouard pourrait être impliqué dans la mort de Maximilien. Elle assure avoir vu une fois Edouard évoquer la mort de ce bébé devant elle, être devenu nerveux et tremblant, comme «elle ne l’avait jamais vu auparavant». «Je pense qu’elle n’a pas dit tout ce qu’elle savait sur Maximilien.» Durant la confrontation, l’avocat de la famille d’Edouard Stern s’était emporté violemment et avait quitté la salle.

Le Temps a révélé que le juge avait demandé à auditionner le romancier et essayiste français Pascal Bruckner, l'un des amants de Cécile B. Surpris d'être convoqué, ce dernier n'en a pas pour autant cherché à cacher la nature de sa relation avec la jeune femme.

A Genève comme à Paris, les proches du couple, célèbres et moins célèbres, craignent de voir leurs noms sortir dans la presse.

Egger Ph.